Prévention des chutes chez les travailleurs seniors : stratégies et bonnes pratiques 

19 décembre 2025

60 % en 2024 : le taux d’emploi des 55 - 64 ans n’a jamais été haut depuis les années 70. Force vive des entreprises pour leur expérience et leur savoir-être, les seniors au travail apportent diversité et transmission de compétences aux équipes. Contrairement aux idées reçues, ils ont moins d’accidents de travail que les jeunes. Mais ils ont un « talon d’Achille » : un risque de chute plus élevé et des conséquences plus graves suite à une chute. Nos conseils pour les protéger et les accompagner. 

Comprendre la vulnérabilité des seniors au travail face aux risques de chutes

Le qualificatif « senior » englobe une population hétérogène de travailleurs. Les effets de l’âge sont différents entre 55 ans et 64 ans, mais aussi entre les seniors du même âge selon la constitution, le mode de vie et l’état de santé.

Rappelons qu’en France, moins de 10% des 55-65 ans sans handicap sont considérés « fragiles » (vulnérables aux stress, atteints de plusieurs maladies).

L’impact du vieillissement sur le travail est léger avant 65 ans si les contraintes (efforts exigeants, pression de temps…) sont faibles. De plus, il est en partie compensé par le savoir-faire et le sérieux des seniors au travail, y compris pour des tâches manuelles. C’est pourquoi les seniors ont globalement moins d’accidents du travail que les jeunes, en particulier liés à l’utilisation d’outils ou au risque routier. 

Par contre, les chutes avec arrêt de travail chez les seniors sont :

  • plus fréquentes : elles concernent majoritairement les salariés entre 40 et 59 ans, les femmes les plus âgées étant plus touchées par les chutes de plain-pied. Dans les accidents de trajet, une chute de plain-pied est impliquée dans 28% des cas chez les plus de 50 ans, contre 12% chez les moins de 50 ans. 
  • plus graves : les arrêts de travail pour fracture suite à une chute de plain-pied sont presque 50% plus longs que chez les jeunes. De plus, les 50-59 ans sont surreprésentés dans les incapacités permanentes et décès dus à ces chutes. La moitié des chutes mortelles concernent les 45-64 ans - contre un tiers chez les moins de 34 ans, selon une étude européenne.

Pourquoi ? Parce que le vieillissement normal entraîne une diminution progressive de la force musculaire, des réflexes et des capacités visuelles, auditives et prioperceptives (perception de la position de son corps dans l'espace qui assure l'équilibre et le contrôle des mouvements).

Chez la femme en particulier, il peut réduire la densité osseuse. Il peut également s’associer à :

  • des maladies chroniques liées à l’âge ;
  • des traitements affectant la vigilance ou l’équilibre ; 
  • une usure prématurée liée à la pénibilité du travail, par exemple une baisse d’audition due au bruit dans le BTP.

Tout se combine donc pour altérer la détection d’un risque de chute ou le rééquilibrage en cas de trébuchement ou de glissade.

Par exemple, un senior au travail ne voit pas un obstacle, n’entend pas un klaxon ou se déséquilibre en portant une charge et ne se rattrape pas avant de tomber. De plus, une chute est plus à risque de fracture chez les seniors que chez les jeunes et la récupération des blessures est plus lente. 

Identifier les situations à risque de chute chez les travailleurs seniors

Les facteurs de risque de chute de hauteur et de plain-pied sont les mêmes pour les travailleurs de tout âge. Toutefois, la prévention des chutes devrait prendre en compte les risques spécifiques des seniors, notamment en veillant bien à l’éclairage des locaux et postes de travail, à l’entretien et au désencombrement des sols ainsi qu’à la mise à disposition d’équipements de protection anti-chute. 

Il faut garder à l’esprit que l’expérience professionnelle ne signifie pas forcément la pleine conscience des risques. Un senior au travail peut se « relâcher » sur les règles de sécurité par excès de confiance, surtout s’il n’a jamais eu d’accident. Il peut aussi ne pas rendre compte de la diminution de ses capacités physiques ou sensorielles. 

Même un travailleur qui « a du métier » doit donc être formé à la sécurité et sensibilisé aux risques de chutes, dès l’accueil à l’embauche et régulièrement tout au long de son parcours professionnel. En particulier, la modification d’une tâche, d’un poste, d’une organisation ou d’un lieu de travail représente une situation à risque accru d’accident. 

Prévention des chutes : accompagner efficacement les seniors au travail

Des actions collectives utiles aux travailleurs seniors peuvent être organisées en entreprise. Il peut s’agir de sensibilisation aux risques de chute au travail, mais aussi de programmes de prévention des facteurs de chute liés au vieillissement : sessions d’activité physique améliorant la souplesse et l’équilibre (yoga, Tai-chi, Pilates…), programmes d’évaluation de l’acuité visuelle ou auditive, outils d’information sur les effets des médicaments sur la vigilance, etc. 

L’équipe du service de prévention et de santé au travail (SPST) de l’entreprise joue un rôle important dans l’évaluation des risques et la prévention des chutes au travail. Elle peut analyser les données des dossiers médicaux de santé au travail, intervenir sur site pour suggérer des mesures ergonomiques destinées à la prévention des chutes, participer aux actions de sensibilisation aux risques et/ou soutenir le maintien en emploi des travailleurs seniors etc.

Le médecin du travail peut également agir auprès de chaque salarié en fonction de son âge, de son état de santé et du poste, en particulier lors :

  • de la visite d’information et de prévention (visite d'embauche) ;
  • de toute visite médicale régulière ;
  • du suivi individuel renforcé en cas de poste avec risque de chute de hauteur (opérations de montage et de démontage d'échafaudages); 
  • de la visite médicale de mi-carrière à 45 ans, qui vise à renforcer la prévention de la santé au travail en sensibilisant le salarié aux enjeux du vieillissement ; 
  • de la visite de pré-reprise, obligatoire pour tout accident du travail ayant entraîné un arrêt d'au moins 30 jours.

Ces rencontres sont l’occasion d’une sensibilisation du salarié senior aux risques et aux mesures de prévention des chutes. Si nécessaire, elles peuvent aboutir à un aménagement concernant par exemple l’ergonomie du poste, la contrainte d’effort, le travail en hauteur ou le rythme de travail.